Un coupable, cinq suspects

UN COUPABLE, CINQ SUSPECTS

CHAPITRE 1

Oh, mon Dieu !
Sarah crie. La directrice du collège de Nogent vient d’entrer dans sa salle de classe pour annoncer :
« Bonjour les enfants, votre professeur de français est absente, on est sans nouvelles d’elle ! »
Un élève, Christophe, demande si la prof est malade ; la directrice répond :
« Nous pensons que c’est un enlèvement ! »
Oh mon Dieu, un enlèvement !
Le silence se fait dans la classe, on pourrait entendre une mouche voler.

Dans la cour de récréation, Sarah et Christophe se retrouvent. Sarah est plutôt petite, vive, aux cheveux bruns et yeux bleus, elle porte un pull-over rouge, une jupe à fleurs et une veste de rockeur. Christophe est blond, mesure un mètre soixante-cinq, sa carrure est sportive, il porte un jogging noir, un tee shirt rouge « Quick Silver » et des chaussures bleues.
 A-t-elle été enlevée pendant qu’elle fumait ? demande Sarah.
 Ou s’est-elle enfuie pour échapper à la correction des dictées ? ajoute Christophe.
 Est-ce qu’elle est, avec son long manteau rouge, dans un bateau ? dans un train ? un avion ? à Hawaï ? En Bretagne ?
 Moi, je l’ai vue prendre le thé avec un jeune homme blond ; est-ce que c’est lui qui l’aurait aidée à s’enfuir ou à être enlevée ?

Sarah et Christophe trouvent que la police n’est pas efficace et décident de mener leur propre enquête.
Mais quelle piste faut-il suivre ? celle du collège ? Ils interrogent les autres élèves pour savoir qui aurait vu la prof en dernier mais aucun des élèves ne peut répondre à cette question. Il y a la piste d’une autre enseignante qui serait jalouse car la prof de français gagnerait plus qu’elle …
Justement, ils croisent un visage familier, Mme Kapasudup, leur ancienne prof de SVT. Les enfants prennent de ses nouvelles, lui expliquent la disparition de leur prof. Mais Kapasudup bafouille, prétend qu’elle n’a pas le temps de discuter avec eux, qu’elle aurait un rendez-vous important.
Christophe remarque alors que Kapasudup a une petite tache sur son manteau, comme une tache de sang. Ils la suivent, discrètement ; elle se dirige tout droit vers une cabane de jardinier. Un homme est devant la porte de sa bicoque et tonne :
 Alors, Mme Kapasudup, où elle en est cette cueillette de fruits rouges ?
Les enfants comprennent qu’ils font fausse route, c’est pas du sang qu’ils ont cru voir, c’est une tache de fruit rouge !

Retour au collège. Ils tombent sur la surveillante. Celle-ci savait que les enfants menaient une enquête ; alors, elle leur dit qu’à ses yeux, c’est la cuisinière qui aurait enlevé la prof, qu’elle tiendrait cette information de la directrice et qu’on aurait même retrouvé un bouton du manteau, rouge, de la prof dans un gâteau, au réfectoire !
 La cuisinière ?! Un bouton ? dans un gâteau ?
Mais qu’est ce que c’est que ça ? Impossible, se disent-ils, et ils cherchent ailleurs.

Un moment ils ont l’idée de faire du porte-à-porte à Quiberon et à Belle-Ile ; la classe en effet revenait d’un séjour à Belle Ile et on savait que la prof avait une maison à Quiberon ; avec l’accord des parents, ils y font un aller et retour mais ça ne donne rien.

DESSIN / PORTRAITS (des enfants)

Une autre piste consiste à visiter l’appartement de la prof, à enquêter dans son quartier.
Voici comment ils trouvent son adresse personnelle : ils connaissent l’emplacement habituel de sa voiture sur le parking du collège. Bizarrement, sa voiture a disparu. Il n’y a là que des papiers au sol, des publicités mais, au beau milieu de toute cette paperasse, ils tombent sur une facture de la prof, avec son adresse !

Dans le quartier, ils interrogent le boulanger qui confirme qu’elle est bien venue il y a une semaine acheter ses deux croissants au beurre comme d’habitude. Il ajoute qu’il a remarqué deux personnes louches qui la suivaient ; celles-ci ne voulaient pas se faire remarquer mais on voyait bien que c’était des jumeaux, pareillement habillés d’une combinaison jaune !
 Des jumeaux ? Mais la prof actuelle de SVT a des jumeaux, non ? demande Sarah.
Plus tard la concierge, une petite mémé, assure avoir vu deux hommes essayer de débloquer le digicode de l’immeuble de la prof. Puis les voisins du dessus pensent avoir entendu, quelques jours auparavant, du bruit et des cris qui venaient de son appartement.

Pour entrer dans le logement, ils prennent l’empreinte de la serrure, se font fabriquer vite fait une clé. Le lieu est rempli de décorations bretonnes ; normal, la prof adorait la Bretagne. Il y a aussi quantité de factures qui trainent, qu’elle a oublié de payer.
Et puis soudain, la porte qui s’ouvre : ciel, c’est Nolwenn, la fille de la prof !

 Mais, mais, qu’est-ce que vous faites là ?
 On enquête sur la disparition de votre mère !
 La disparition ?
 Oui, de votre mère !
 Mais ma mère n’a pas disparu.
 Comment ?
 Parfaitement, ELLE N’A PAS DISPARU !
 Mais alors pourquoi elle est absente du collège ?
 Elle est en voyage.
 En voyage ? Et pourquoi elle ne nous a rien dit ?

Brusquement, la jeune femme pousse les deux enfants hors de l’appartement et leur claque la porte au nez.
 C’est louche, dit Sarah.
 Louche, répète Christophe.

Deux jours plus tard, arrive le remplaçant de la prof, M. Martineau ; les enfants n’aiment pas son air mystérieux.

Quant au mystère de la disparition de la prof, il reste entier. On dit que le coupable serait le mari, jaloux de tout l’argent de sa femme ; on dit qu’il y aurait une affaire de racisme derrière tout ça, contre le boulanger ; on dit que Martineau et Nolwenn seraient ensemble ; on dit qu’une caméra vidéo a tout filmé ; on dit que la prof serait détenue dans la cave d’un voisin ; on dit que sur son agenda, la page du jour de l’enlèvement aurait été arrachée ; on dit qu’il faut chercher du côté du banquier ; mais on dit tellement de choses.
Comment continuer l’enquête ?
« J’ai une idée, dit Sarah, mon oncle Robert est dans la police ; je vais lui demander de nous aider ; je vais lui envoyer la photo de la prof, lui demander ce qu’il sait d’elle et lui dire que s’il me répond, ce sera de sa part mon cadeau d’anniversaire !

Chapitre 2

Dix minutes plus tard, ils arrivent au commissariat où travaille l’oncle de Sarah. A l’intérieur du bâtiment, il fait sombre. Un policier les aborde :
 Que faites vous ici ? Ce n’est pas un endroit pour les enfants.
 Je cherche mon oncle Robert, il est commandant ; c’est un homme grand, 1m85, sportif, les yeux bleus, les cheveux coupés court.
 Ah oui, le commandant Robert, je le connais bien, ses amis sont mes amis ; suivez moi.

DESSIN / VOIITURE ou Parking

Il conduit les enfants vers le bureau de l’oncle puis retourne à ses occupations.
 Ma nièce adorée ! ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vus ! tu m’as manqué, tu sais ? Quelle est la cause de ta venue ?
 Toi aussi, mon oncle, tu m’as manqué. Je te présente mon ami Christophe.
Puis elle explique la disparition de la prof, la date où l’affaire s’est passé, elle parle de tous les personnages plus ou moins suspects, notamment de Nolwenn, la fille de la prof.

Le policier est au courant. Il informe par exemple les deux enfants que l’on a retrouvé un cœur dans l’appartement de la prof disparue.
 Un cœur ? quelle horreur !
 Et sur ce cœur il y avait les empreintes de Mme Kapasudup, la prof de SVT.
Silence, on attend la suite.
 En fait la prof disparue avait tout simplement emprunté à Kapasudup un cœur de veau que celle-ci voulait disséquer avec ses élèves.
 Fausse piste ?
 Fausse piste !

 Quant à Nolwenn, poursuit le policier tout en regardant son écran, ce prénom me dit quelque chose ; oui, voilà, Nolwenn était en prison ; elle en est sortie le jour même de la disparition de votre prof, de sa mère.
 C’est bien ce qu’on pensait, disent ensemble les enfants.
 Oui mais elle est sortie de prison en soirée alors que votre prof a disparu le matin.
Oups !

Robert est en forme, il n’arrête pas de se confier.
 Je vous parlais de la visite de l’appartement de la prof ; figurez vous qu’on a retrouvé autre chose de très étrange : une prothèse !
 Une prothèse ?
 Oui, une prothèse de jambe. Est-ce que ça voulait dire que le kidnappeur était unijambiste ? Le numéro de série de cet objet était illisible mais on a réussi à mettre la main sur le bonhomme ; c’est un ancien ami de lycée de la prof ; il avait sept ans quand un camion lui est passé sur la jambe ; on a du l’amputer sous le genou. Il reconnaît qu’il a oublié sa prothèse lors de sa dernière visite à son amie prof. Drôle d’oubli, non ? Mais bon, voilà encore une fausse piste.

Toujours aussi bavard, Robert continue :
 Vous ne le savez pas mais le professeur remplaçant, M.Martineau, a reçu une lettre, de menaces ; elle disait textuellement, il nous l’a donnée, je l’ai ici : « Je vais capturer tous les professeurs de ce quartier pour les remplacer par des personnes malveillantes qui feront de toutes les écoles des usines ». Incroyable, non ? Martineau, toujours, recevait peu après une autre lettre lui fixant rendez-vous avenue du duc. On n’a pas bien compris mais on prend tout ça au sérieux.

DESSIN / LES JUMEAUX

Les enfants écoutent, le commandant reprend :
 Je peux vous dire une autre chose intéressante. En cherchant un peu dans nos dossiers, si je n’ai rien sur votre professeur personnellement, par contre j’ai trouvé un dossier sur son père. Il y a déjà pas mal de temps, le père de votre prof a été poursuivi pour violence, maltraitance et harcèlement exercée sur une jeune femme ; or cette femme, écoutez moi bien, c’est la mère de la surveillante du collège !
 Non ! s’étonnent les enfants.
 Si ! Et ça veut peut-être dire qu’il y a la dessous une affaire de vengeance, une très vieille histoire.

Il ajoute qu’il y a plein d’autres pistes ; on prétend que le mari de la prof faisait de la prison depuis des années, qu’il aurait un casier judiciaire bien rempli ; il était en ce moment même dans une cellule du commissariat.
 Peut-on le voir ? quel est le numéro de sa cellule ?
 N150502, c’est au bout du couloir, à droite.
 On y va.
 Je vous accompagne.

Arrivés devant la cellule, ils demandent au prisonnier qui a une balafre en travers de la joue, un sourire bizarre, le visage sale, des yeux cruels et les cheveux longs et bruns :
 Savez vous quelque chose à propos de l’enlèvement de votre femme ?
 Mais j’ai pas quitté ma cellule depuis cinq ans ! Vous avez autre chose à me demander ? répond-il, agressif.
 Vous permettez qu’on entre dans votre cellule ?
 Non, dit-il, catégorique.
Les enfants sont terriblement déçus.

Plus tard, après avoir mangé des crêpes au jambon fromage très salées, le commandant, et les enfants, vont sonner chez Nolwenn pour l’interroger ; mais le policier la rencontre finalement seul et il la trouve très gentille, contrairement à l’opinion des enfants. Puis ensemble, ils vont au collège questionner le cuisinier ; le policier récupère les vidéos de l’intérieur de la cuisine qu’il compte visionner vite.
Sur le chemin, ils passent à la banque pour retirer 50 euros ; il y avait là deux banquiers qui avaient exactement le même physique, les mêmes vêtements, le même tatouage. Bizarre, bizarre.

L’affaire en effet devenait de plus en plus complexe, les personnages, et les suspects, de plus en plus nombreux. On parlait même maintenant d’un autre vieux règlement de comptes entre le père de la prof de maths et le père de la prof de français…

 J’ai une idée, dit Sarah. On va inviter tous ces gens, l’unijambiste, Nolwenn, le boulanger (celui qui fait du bon pain de pays), les jumeaux, etc, à une fête ; et on y démasquera le coupable.
 Autre idée, ajoute Christophe, on va leur dire qu’on fait une peinture tous ensemble ; il y aura à l’entrée de la fête un grand tableau avec un pot de peinture ; on va demander à chacun de tremper sa main dans le pot puis de mettre sa marque sur la toile ; comme ça on aura les empreintes de tout le monde sans qu’ils s’en doutent.
 Et on trouvera parmi eux notre kidnappeur !
 Je vais venir à votre fête, dit Robert.

Chapitre 3

Le jour de la fête, tous les invités vinrent sauf le boulanger qui avait une allergie à la farine. Il y avait donc là le surveillant qui avait mis un smoking et une cravate à pois blancs ; les jumeaux qui étaient des banquiers, l’unijambiste, la fille de la prof, la cuisinière, etc. Robert, qui arriva le dernier, avait passé son bel uniforme. Et tous, même les enfants, même Robert, mirent leurs mains peinturlurées sur la toile « pour garder un magnifique souvenir de cette fête » leur disait-on. Les jumeaux s’amusèrent à se peindre eux mêmes.

DESSIN / CROISSANT AU BEURRE

Sarah prit alors la parole :
 Mesdames, messieurs, merci à tous pour les dessins. Ainsi vous nous avez donné vos empreintes... Le commandant Robert ici-présent va pouvoir tout de suite comparer car la police a relevé des marques de doigt sur la lettre anonyme adressée à M. Martineau et ces marques, ce sont les empreintes du kidnappeur.

Pendant que le policier allait faire les analyses demandées, Christophe regarda longuement chaque participant :
 Qui est le coupable ? Vous, madame la surveillante ? vous auriez pu vous venger pour cette ancienne histoire de famille mais vous aviez peur de la prison… Ou vous la cuisinière ? vous auriez très bien pu enlever la prof qui n’aimait pas vos plats et qui le disait mais vous aviez un alibi… Ou vous, Nolwenn ? Qui étiez très en colère contre votre mère mais il paraît que vous étiez encore en prison au moment de la disparition… ? Ou vous l’unijambiste : on raconte que c’est la prof qui vous aurait poussé sous le camion quand vous aviez sept ans ; mais tout le monde dit aussi que vous êtes tellement de grands amis… Ou vous les banquiers, de faux banquiers à mon avis car j’ai trouvé sur internet votre véritable identité, vous vous appelez Alfredo et Toni et vous avez déjà un drôle de passé… Et je ne parle pas du boulanger, comme il est absent ; à mon avis, il aurait aussi pu être le coupable mais la prof lui ramenait beaucoup d’argent en lui achetant ses croissants alors il devait hésiter…

Le commandant Robert revint peu après ; il avait à la main l’enveloppe contenant la lettre anonyme adressée à Martineau et il déclara :
 Malheureusement, on a bien tout comparé, aucune empreinte ne correspond à celle de la lettre. Désolé. Le coupable ne se trouve pas ici.

Les enfants étaient très déçus ; ils croyaient l’enquête presque terminée, et réussie ; c’est alors que Sarah eut la curiosité de prendre la lettre anonyme ; elle l’ouvrit et aussitôt s’écria :
 Mais… mais… c’est l’écriture de Robert ?! C’est ton écriture, mon oncle, que je vois là ! C’est le commandant qui aurait enlevé la prof ?!

Tout le monde était choqué, le policier n’avait pas bougé. Il n’offrit aucune résistance et expliqua toute l’histoire :
 Votre professeur et moi étions très amoureux à une époque ; nous étions très heureux jusqu’à ce qu’elle croise le boulanger qui faisait si bien les croissants au beurre. Voilà pourquoi je l’ai enlevée ; j’espérais qu’elle m’aimerait encore ; elle est enfermée dans ma cave ».

La prof fut retrouvée et le policier arrêté. Il paraît qu’au fond de sa cellule, il répète tout le temps : « Maudit croissant au beurre ! »



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