Collège Creteil/Oval/Belle Ile

PREFACE

Rien dans les mains, rien dans les poches, tout dans la tête. C’est, pour écrire vite, ainsi que commença notre atelier d’écriture avec les élèves de 6è du collège de Maillé, Créteil. On a fait, ensemble, le pari qu’il y avait, sous ses aimables caboches, quantité d’histoires, d’envies de raconter des histoires, qui ne demandaient qu’à s’exprimer, qu’à s’écrire. Pari tenu, pari gagné.
Sur un mode qui flirte avec le genre fantastique dans la première nouvelle (« Belle Ile en quête »), sur un mode plus roman policier pour la seconde ( « Orphelins éphémères »), ce collectif d’auteurs en herbe s’est amusé avec les mots, les phrases, les intrigues, les rebondissements, les personnages, les décors.
On s’est raconté des histoires à se faire peur juste pour le plaisir de se rassurer tout de suite après.
Une idée en appelait une autre, une phrase entraînait une suivante et peu à peu le texte s’est formé, l’aventure s’est tissée. Restait à trouver un titre, des illustrations, une couverture et la magie a opéré, une fois encore : au terme de trois rencontres de travail, le livre est là !
Merci aux collégiens pour leur inventivité. Merci aux enseignants pour leur disponibilité. Merci à OVAL pour son savoir-faire.

Gérard Streiff
Orphelins éphémères

Chapitre 1

En rentrant de colo, les parents de Luttsyka avaient disparu. C’était difficile à croire mais c’était vrai. Pourtant, sur le chemin du retour, dans le TGV, elle était toute contente de leur raconter ses aventures, le voyage, sa chambre avec sa nouvelle amie, ses jeux.

Le train entrait en gare de Parnassemont, la prof interpellait les élèves :
 Les enfants, on arrive, préparez vos affaires, faites attention de ne rien oublier.
A la descente du wagon, Luttsyka ne vit pas ses parents. Elle les chercha désespérément, alla voir la prof qui essaya de les contacter. Sans succès.
Peu à peu, tous les élèves étaient repartis sauf elle.

Luttsyka rappela ensuite, laissant un message sur le répondeur : « Salut maman et papa, où êtes vous ? J’espère que vous allez bien. Bisous, je vous aime ».
Une crainte l’envahit, elle s’inquiéta, se posa plein de questions. « Et si mes parents m’avaient oublié ? et si je ne les retrouvais pas ! Autant ne pas y penser ! »

Son ami Trevor était sur le quai, elle lui expliqua ce qui se passait ; ils rentrèrent en métro.
La mère de Trevor était styliste, pour les stars, le père banquier le jour, chauffeur de stars la nuit.
 Mais j’ai pas les clés ! dit soudain la jeune fille.
 Personne n’a les clés de chez toi ? demanda Trevor.
 Ah si, la gardienne !
Celle-ci en effet les lui donna.

Ses parents étaient archéologues. Leur appartement était rempli d’outils et d’objets liés à ce travail. Mais ce soir-là, tout était éparpillé. La porte d’entrée avait été forcée, la maison était sens dessus dessous. Le chien avait disparu, les rideaux étaient déchirés, le tableau que son père avait peint n’était plus là.

Un moment, ils entendirent du bruit, ils crièrent :
 Qui va là ?
 N’ayez crainte, ce n’est que votre voisine, dit une dame.
Soulagement immédiat. Ils lui demandèrent si elle avait vu ses parents, la voisine répondit :
 Je les ai vus partir, en effet !
 Vous ont-ils dit où ils allaient ?
Mais elle n’en savait rien.

DESSIN 1, PORTRAIT ENFANTS

Plus tard, la jeune fille retrouva bien le sac à main de sa mère mais il n’y avait plus rien dedans. Ou plutôt si, un mot qui disait : « Ne pas chercher à nous contacter, on doit régler quelque chose, ne prévenir personne ! »
Luttsyka pleura.

 J’ai vu tes parents se disputer, je ne sais pas à quel sujet, ça avait l’air grave ! lui dit le garçon, le lendemain.
 Ah oui, je me souviens, ils ne se parlaient plus depuis la veille du voyage.
Une nouvelle fois, la jeune fille appela son père. Mais l’échange fut bizarre, cela se passa ainsi :
 Oui, allo, c’est qui ?
 C’est Luttsyka. C’est pour te demander…
 Bip, bip, bip, bip…
A présent, elle était vraiment très inquiète. Elle avait toujours pensé que sa famille était calme, tranquille, gentille, toujours de bonne humeur, plein de bonnes idées. Mais est-ce que c’était vrai ?

 On va mener l’enquête, ensemble, lui dit Trevor.
Elle lui sauta au cou, lui fit plein de baisers sur la joue, ils se tapèrent dans la paume de la main. Et ils commencèrent à examiner l’appartement à la recherche d’indices.
Un moment, Luttsyka dit à son ami :
 Je vais te dire un secret. Mon père, archéologue donc, a appris un jour, par quelqu’un qui est mort aujourd’hui, l’emplacement d’un trésor !

Au même moment, la jeune fille reçut sur son portable ce message de son père, justement :
 Ma fille, le médaillon que nous t’avons offert à ta naissance, apporte-le à cette adresse : 14, rue du Château, Paris. Sois prudente.

Elle comprit alors que ses parents étaient en grand danger.

Chapitre 2

Une nouvelle fois les enfants fouillèrent l’appartement de fond en comble. Luttsyka pensait avoir caché le médaillon dans le grenier, au dos d’un cadre qui représentait sa grand mère mais elle ne le trouva pas ; elle avait juste une photo du médaillon. Elle se rappelait bien de cet objet tout en or avec une pépite de diamant. On se transmettait ce bijou de génération en génération. Il était bien connu et beaucoup de voleurs voulaient le prendre. On raconte même qu’un employé de son père, pourtant le plus fidèle des employés, était un jour entré discrètement dans la maison et avait essayé de le voler mais il n’avait pas réussi.

Luttsyka demanda à Trevor s’il avait vu l’objet, il répondit que non. Alors ils décidèrent d’aller à Paris.
Place Verland, ils croisèrent une dame vêtue de rouge et lui demandèrent :
 Connaissez vous la rue du Château, SVP ?
 Non, désolé, mais quelqu’un peut vous aider : allez voir le barman, en face.
Au bar, la jeune fille reposa la question.
 Oui, répondit l’homme du café, prenez la rue juste à côté, au bout de cette rue, tournez à droite, et vous serez arrivés.

La rue du Château était sinistre ; il n’y avait là que des personnes avec un tatouage de serpent sur le bras. Au numéro 14 se trouvait une grande maison qui ne leur dit rien qui vaille. Ils entrèrent d’abord dans une boutique qui les surprit. C’était une boutique de tatouages. Le commerçant était barbu, musclé, couvert de piercings et tatoué partout. Il y avait là un chien qui ressemblait beaucoup au chien de la jeune fille, Roméo, mais ce n’était pas Roméo.
Luttsyka demanda au tatoueur :
 Pouvez vous, SVP, regarder cette photo de médaillon et me dire à quoi il correspond ?
 Euh… j’comprends pas, mais faites voir quant même ! Elle lui montra la photo, l’autre dit :
 Euh…j’vois pas. C’est l’arc de triomphe ?!
N’importe quoi.
 Bon merci beaucoup, au revoir, répondit la jeune fille.
Dehors, Trevor ajouta :
 C’était une piste mais elle est fausse ; vu les circonstances, ce tatoueur n’a rien à voir avec notre histoire.

DESSIN 2, MEDAILLON

Il y avait d’autres habitants au numéro 14 ; ils sonnèrent à la porte à côté de celle du tatoueur.
 On verra bien, dit la jeune fille.
Quelques secondes après, une vieille personne ouvrit la porte.
 Je m’appelle Germaine, et toi, tu t’appelles Luttsyka, dit-elle en désignant la collégienne.
La jeune fille en était terrifiée.
 Viens, entre, entre donc ! Entre jeune fille avec ton compagnon.

Les enfants étaient estomaqués mais ils entrèrent. L’intérieur de la demeure était sombre, lugubre, à faire froid dans le dos.
 Alors c’est toi qui vient pour le champignon ?
 Pour le médaillon, rectifia Luttsyka, pour le médaillon.
 Oui pour le champignon, reprit la dame.
Trevor dit alors tout bas à Luttsyka :
 Je crois bien que cette vieille dame est complètement folle.
Et ils sortirent.

De nouveau dans la rue, la fille regarda son ami :
 Je crois qu’il faut réfléchir à une stratégie avant de sonner.
Puis ils tapèrent à une autre porte encore. Et cette fois ils tombèrent sur leur directeur de collège ! Celui-ci les invita à rentrer chez lui.
 Pourquoi venez vous ? demanda-t-il.
 Nous voulons prendre de vos nouvelles.
 Et vous, comment allez-vous depuis la colo ?
Les enfants répondirent qu’ils allaient bien.
 Avez vous retrouvé les parents de Luttsyka ?
Celle-ci devint triste, se mit à pleurer, répondit qu’elle était sans nouvelles.
Le directeur leur proposa de les raccompagner chez eux mais ils le trouvèrent louche et refusèrent.

Rue du Château, ils aperçurent quelqu’un qui faisait les magasins ; en y regardant de plus près, ils reconnurent Mme Lily, prof d’EPS ; elle avait l’air moins sportive que d’habitude. Les enfants lui parlèrent de leurs problèmes mais Mme Lily ne pouvait rien faire pour eux car elle devait aller chercher de nouvelles chaussures chez Cherima. Elle semblait bizarre ; ils la suivirent et la virent ensuite sortir du magasin avec plein de boîtes de chaussures. « Mais avec quel argent pouvait-elle acheter tout cela ? » se demandèrent-ils.

C’est alors que Luttsyka crut voir sa mère avec un autre homme que son père ; l’homme avait un pistolet qui semblait sortir de sa botte. La jeune fille voulut intervenir mais sa mère lui fit des gestes pour qu’elle ne s’approche pas. Elle entendit l’homme parler au téléphone, il parlait d’une adresse, 13 rue de la forêt vierge. Ce lieu rappelait à la jeune fille une ancienne affaire de terrorisme.
L’homme disait encore :
 Bon, on fait quoi ? Tu les as pas tués, au moins ? on a encore besoin d’eux !

DESSIN 3, TATOUEUR

La jeune fille choquée dit un peu trop fort « Oh mon dieu ! ». L’homme se retourna, la fusilla du regard. Trévor dit :
 Cours !
Et ils partirent en zigzagant dans une ruelle sombre pour ne pas être rattrapés. Puis ils entrèrent de justesse dans un wagon de métro, laissant les deux personnes sur le quai.
Luttsyka réalisait que ce n’était pas sa mère qu’elle avait vue là.

Un peu plus tard, elle réécouta sa messagerie et remarqua que le message des parents lui fixait rendez-vous au « 114 » rue du Château et non au « 14 ». Cela changeait tout !

Chapitre 3

Le lendemain matin, Luttsyka réécouta le message pour être sûre de l’adresse, 114, rue du Château.
Elle était bien déterminée à retrouver ses parents.
Quelle piste suivre ? il y avait la piste de Mme Lily, la prof d’EPS, soudain riche. On l’avait vue avec un ticket, mais c’était un ticket de loto. Sa richesse s’expliquait : Mme Lily n’avait rien à voir avec cette histoire.

C’est alors que la jeune fille vit Trévor pensif.
 Qu’est-ce que tu as ? lui demanda-t-elle.
Après quelques secondes de réflexion, le garçon répondit :
 Hum…ru vois les voleurs ?! Hé bien, hum.. ;c’est moi…qui leur ai dit.
 Dit quoi ?
 Que tes parents savaient où était le trésor !
 Quoi ? quoi ? Tout ça, c’est de ta faute ? dit la fille en colère et, en pleurs, elle se laissa aller contre le mur.

Trevor poursuivit, les larmes aux yeux :
 Désolé, vraiment désolé, mais si je ne l’avais pas dit, je serais mort ! Allez, arrête de pleurer et essayons de retrouver tes parents.

Sur le chemin du 114, rue du chateau, Luttzyka eut une drôle d’idée. « Et si tout ça, cette disparition, ce rendez vous, c’était une mise en scène de mes parents pour fêter mon anniversaire ! » Mais malheureusement l’affaire était sérieuse et elle le savait.

Un moment, ils imaginèrent aller dans une bijouterie, à Paris, demander qu’on leur fasse une copie du médaillon qu’ils proposeraient aux kidnappeurs. Mais ça prendrait une semaine, c’était trop long.

Rue du Château, ils marchèrent devant plein de boutiques, toutes aussi bizarres les unes que les autres. Il y avait une boutique d’animaux venimeux, comme des araignées, des serpents. Dans des bocaux, en vitrine, on voyait des dents.

Les enfants cherchaient comment tendre un piège aux kidnappeurs.
 J’ai un plan, dit Trévor ; je viens de voir dans une petite cabane de jardin un filet de pêche. On retrouve les bandits et on installe le piège. On va les attirer en criant « Coucou, c’est nous qui avons le médaillon ! Venez le chercher si vous le voulez ! ». Là, ils arrivent tous et on leur renverse le filet sur la tête !
 Mouais, répond Luttzyka, à moitié convaincue. Moi, je verrais plutôt ceci : on se déguise en vieilles personnes, mal rasées ; on va dans le bar à côté du 114, on fait semblant de boire de la bière alors que c’est du jus de pomme. Quand les bandits arrivent au bar, on se met à côté d’eux, on parle comme eux, « Hech, hech… », et, discrètement, on met du somnifère dans leurs verres ; ils vont s’endormir et on alors libère les parents.

DESSIN 4, PLAQUES DES RUES

Cette fois, c’est Trévor qui n’était pas convaincu. Lui il proposa de faire un piège avec de la glue et de l’alcool :
 Mélangés, dit-il, ça devrait faire une réaction chauffante et collante.
La fille ne réagit pas à cette proposition mais dit :
 Je cache une pelle d’archéologue dans mon pantalon, j’assomme les gangsters et quand je sifflerai trois fois, toi, tu viendras délivrer mes parents…

Tout d’un coup, Luttsyka fit un petit bisou sur la joue de Trévor qui devint tout rouge.

Au numéro 114, la porte sur la rue était fermée à double tour mais la porte de derrière, elle, n’était pas fermée. Ils apprirent que leurs parents étaient enfermés tout en haut de l’immeuble.
 Je monte le premier, dit Trévor, toi, tu te caches et tu filmes la scène pour la donner à la police.
Au dernier étage, le garçon toqua à la porte.
 C’est moi, Trévor, dit-il, inquiet.
Un des voleurs, un certain Germain, un petit moustachu, entrouvrit la porte :
 Oui ? t’as d’autres informations ?
Mais il se méfia et intercepta le garçon ; comme celui-ci résistait, l’autre lui attrapa le bras, le jeta à terre.
 Petit saligaud, tu te rebelles, je savais bien que tu n’étais pas digne de confiance…
C’est alors que le père de Luttzyka intervint, frappa le voleur, le mit K.O.
Les autres s’enfuirent.

Plus tard, les policiers attrapèrent les brigands et les emmenèrent au commissariat. Ils furent condamnés à de longues années de prison ferme pour kidnapping. En rentrant chez eux, le père de Luttzyka raconta à sa fille qu’il avait été appelé pour une fouille archéologique mais c’était un piège, des voleurs voulaient le médaillon ; ils savaient que ce fameux médaillon était en fait la clé d’un trésor.

« Surtout, garde le bien, dit le père.
 Oui, oui, ben sûr, bien sûr, répondit sa fille.

Elle n’osa pas lui dire qu’elle ne savait plus du tout où était ce foutu médaillon !
Comme cela, voilà un trésor qui va rester secret pour l’éternité !
Fin

Belle ile en quête

Chapitre 1

Du bateau, on ne voyait personne sur Belle Ile. Les rues du port étaient vides, les maisons ouvertes, inoccupées, les voitures abandonnées, les boutiques désertées.
Tayron demanda à son amie Ana :
 Que se passe-t-il ? où sont-ils tous ?
Elle répondit qu’elle n’en savait rien.

Les deux jeunes gens étaient venus à Belle Ile en classe découverte. Ils avaient pris le TGV, le car puis le bateau.
Mais arrivés au port, personne !
Et puis du brouillard recouvrait l’horizon.

A bord du ferry, tout le monde était inquiet, c’était la zizanie. Des élèves appelaient leur parent.
Pétrifiés de peur, Ana et Tayron restèrent une heure sur le bateau puis, prenant leur courage à deux mains, descendirent sur le quai. Un accompagnateur leur dit :
 On va chercher les valises dans le conteneur.
Mais le temps passa, personne n’autre ne descendit. Les profs, toujours sur le bateau, regardaient les deux enfants, en leur faisant un signe de la main, comme s’ils se moquaient d’eux.
 Cette classe découverte promet d’être riche en mystère ! dit Tayron qui ne trouvait pas ça très cool.
 Viens, allons voir ce mystère de Belle Ile, répondit Ana, alors que le garçon avait un peu peur de cette aventure.

DESSIN 1
PORTRAITS DEUX ENFANTS

Tayron était rusé, c’était un brun aux yeux vert. Ana, susceptible mais téméraire, était blonde aux yeux bleu.
Ensemble, ils décidèrent de mener l’enquête.

Le port était complètement vide, pas de bateau, pas de pêcheur. Tout était à l’abandon. Comme cette auberge aux portes ouvertes, aux fenêtres brisées. C’était effrayant. Ils passèrent devant la forteresse Vauban où ils trouvèrent… un indice : c’était un message codé. Mais que disait-il ?

Un moment, ils entendirent un cri. Et ce cri n’était pas comme les autres cris. Pas un cri d’animal, pas un bruit de la nature ; c’était un cri d’humain.
Tayron, pris de peur, se blottit contre Ana, puis il tomba dans les pommes. Ana le secoua. Pas de réponse.

Dans son bref coma, le garçon fit un rêve : Il se retrouvait devant un groupe d’enfants, muets, car ils avaient la bouche cousue ! Ce groupe le conduisit devant une grande forteresse sur laquelle était inscrit un sigle étrange, représentant une petit triangle noir dans un grand triangle blanc et ce symbole était barré d’un long trait, comme traversé par une flèche. Comme il était impossible de découdre la bouche des enfants, Tayron tenta de communiquer par signe. Il était question d’une prison pour enfants, d’une cellule, de barreaux entre lesquels il glissait sa tête, d’un homme étrange qui le saisit et qui voulut lui coudre la bouche ! Tayron se réveilla.

DESSIN 2
ENFANTS BOUCHE COUSUE

En sortant de la ville, sur un panneau, on voyait la photographie d’un sage, un homme éloigné de toute civilisation, longue barbe blanche, l’air alcoolique. « Je m’appelle Jean-Charles, disait le texte, je vais vous raconter une prophétie sur la disparition des gens. Il y a très longtemps, un roi aimait faire la guerre. Mais il n’avait plus de soldats. Alors il utilisa son peuple pour se battre mais ce peuple en avait assez de batailler ; aussi le roi lui lança une malédiction, leur disant que tous les 2000 ans les habitants de ce royaume disparaitraient. Il était encore question d’une énigme à résoudre.

Les deux collégiens poursuivirent leur recherche quand soudain ils entendirent… la sonnerie d’un téléphone ! Un portable était là, devant eux. Ana le prit, sans hésiter. Qui appelait ?

Chapitre 2

 Allo, dit la voix. Elle était grave, effrayante. Je ne peux pas parler longtemps, je viens de la prison des enfants, je vous donne rendez vous à la plage de port Fouquet dans deux heures. Ou non, non, plutôt à la grotte de l’apothicairerie ! Vous y chercherez le symbole, celui qui était dans le rêve de Tayron.
 OK, pas de soucis, on vous rejoint.
Ana raccrocha et répéta tout à Tayron.
Ils se dirigèrent vers la grotte, ils se doutaient d’un piège.

Sur le chemin, Tayron dit :
 J’ai de plus en plus peur !Imagine qu’on tombe sur un grand homme masqué qui nous attrape avec un sac de patates !
— Mais la personne au bout du fil pourra peut-être nous aider à rentrer chez nous, répondit Ana.

Dans la grotte, aucune silhouette en vue, pas un bruit. Ils découvrirent un coffre. Que cachait-il ? Il était fermé à clé que les enfants se mirent à chercher. La coque du téléphone était en forme de clé. Ils l’essayèrent, le coffre s’ouvrit. A l’intérieur il y avait un papier avec le fameux symbole et un message qui disait : fais deux pas sur la gauche, quatre pas en avant, trois pas à droite et monte sur l’objet que tu trouveras. Les deux enfants suivirent ces ordres et se retrouvèrent devant un tapis sur lequel figurait le symbole, un petit triangle noir dans un grand triangle blanc, traversé d’un trait.

DESSIN 3
SYMBOLE/TRIANGLES

Tayron hésita mais Ana fit le dernier pas à faire et… tomba dans un trou. Tayron y sauta à son tour. Et lui, il retomba dans les pommes.
Allait-il rêver une nouvelle fois des enfants disparus à la bouche cousue ? ces enfants qui voulaient lui dire quelque chose mais qui ne le pouvaient pas ? Pas du tout. Il rêva d’une immense prison sous-marine où vivaient tous les habitants de Belle-Ile. Puis il s’imagina traverser un magasin à l’abandon où, sur un écran de télévision, un chevalier, qui ressemblait au roi de la prophétie, le regardait et lui disait : arrête d’essayer de me retrouver, de te mêler de mes affaires sinon gare à ta vie !

Il se réveilla. Et il dit à Ana qu’il fallait trouver des combinaisons de plongeur. Mais elle ne l’écoutait plus : grâce à ses allumettes, elle venait de faire de la lumière ; au fond du trou, pas d’ossements mais il y avait là le vieux sage qui répétait « Je sais tout ! Je vois tout ! Je sais tout ! Je vois tout ! »
Ana lui demanda :
 Que s’est-il passé ?
 Répondez, s’énerva Tayron.
Le sage lui lança un regard qui le calma et raconta…

Chapitre 3

« Je vais vous dire pourquoi on ne voit plus de Bellilois sur cette île, répondit le sage. Il y a plusieurs explications possibles. Les uns disent que c’est la faute des Anglais ; il y a trois ans, en effet, le roi d’Angleterre a demandé à Belle Ile une grosse somme d’argent. Sous peine d’enfermer pour six mois tous ses habitants. L’île n’avait pas cette somme. Choqués les Bellilois préparèrent leur bagages pour partir mais trop tard, les Anglais arrivaient et mirent tout le monde en prison.

Autre explication : il y a eu une guerre entre Belle Ile et l’Ile aux moines. Mécontent d’avoir perdu, le roi de l’île aux moines s’est vengé sur les enfants à la bouche cousue et sur les adultes.

D’autres encore disent que c’est la faute à la montée des eaux, qu’on a peur d’être emportés par une vague maléfique ; les gens d’ici auraient donc décidé de construire une forteresse sous-marine, avec une grande porte rouge, pour se protéger de la mer. Pour les retrouver, il faudrait mettre des combinaisons de plongée.

Certains prétendent que le symbole du triangle noir dans le triangle blanc, traversé d’une flèche, montrerait la porte d’entrée de la cache des Bellilois ; si on appuie sur ce symbole, un rocher se déplacerait et on arriverait à une grotte pleine de squelettes… et d’habitants.

Enfin on raconte aussi qu’il faudrait trouver la clé magique qui ouvrirait la porte de la prison des Bellilois ; que si on plonge dans la mer avec cette clé, on est attirée par la prison ; que si un requin arrive à ce moment-là, on disposait d’un collier capable de faire exploser l’animal ; qu’il fallait résoudre une énigme, libérer les habitants ; puis prendre une bombe et quand tous les Bellilois seraient en sécurité, on jetterait la bombe dans la prison qui exploserait…

 Et qu’en est-il de cette histoire des enfants à la bouche cousue qui étaient dans le rêve de Tayron ?
 Hé bien…heu… hum…on a dit que Tayron faisait des rêves prémonitoires, des rêves qui annonçaient ce qui allait bientôt se passer mais c’était une mauvaise piste.

DESSIN 4
LE VIEUX SAGE

Les enfants étaient déçus de ce long sermon du sage. Ils commençaient à se demander si tout ça, la Chataigneraie, les enfants à la bouche cousue, le sage et le roi, la grotte, etc…n’était pas un rêve et s’ils n’allaient pas se réveiller… dans le TGV !

Le sage alors leur dit :
 La vérité est plus simple. Suivez-moi. Il faut d’abord essayer de sortir d’ici et croyez-moi, ce n’est pas une partie de plaisir.
Mais Ana qui regardait le décor cria :
 Regardez, une échelle !
Ils montèrent, suivis du sage qui les conduisit à l’ancienne prison des enfants.
Ana prit la main de Tayron et l’attira vers elle. Ils arrivèrent en face d’une grande porte sur laquelle on voyait le même fameux symbole ; derrière cette porte on entendait de la musique.
Ils entrèrent. Tous les habitants de Belle-Ile étaient là, en train de danser ! Les enfants regardèrent le sage qui leur dit :
 On fête le dernier film de Jean Dujardin, « Les enfants à la bouche cousue », qui a été tourné à Belle Ile !

Tayron demanda à une dame qui dansait :
 Mais que se passe-t-il ici ?
 La prison a été transformée en salle de fêtes ; tout le monde fête la sortie du film !
Le sage souriait. Ana reprit :
 C’est fini, notre enquête maintenant. Belle Ile n’a plus de secrets pour nous.
Les enfants, le sage, les habitants, tous festoyèrent ensemble toute la nuit.
Plus tard, de retour au port, ils virent que le ferry était toujours là. Et les professeurs toujours sur la passerelle. On allait pouvoir rentrer à la maison mais cette histoire resterait gravée au cœur de tout le monde.

Fin



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