Le bonheur libéral

Ancien marxien passé à droite, Lipovetsky a fait du libéralisme son fonds de commerce. Vive le vide libéral, dit-il en 1983 (L’ère du vide), vide qui vaut bien pour lui tous les trop-pleins progressistes de la décennie précédente. Vive l’individu libéral, poursuit-il, l’être atomisé loin de toute attache, de toute classe et tellement libre ! Vive le bonheur libéral, assure aujourd’hui notre idéologue dans son dernier opus, « Vivre à l’âge du capitalisme artiste ». « On nous dit que le capitalisme, c’est la finance, s’explique-t-il. Ce n’est pas que ça ! Le capitalisme a créé un type d’art de consommation de masse : le cinéma, la musique pop, les mass-médias, les architectures spectacles, les défilés de mode comme des tableaux vivants, le design. C’est un système qui crée de la laideur, tout le monde le sait, mais aussi de la beauté. » En fait, ce que cet essai montre surtout, c’est que le fric transforme en fric tout ce qu’il touche : « La libre concurrence a tout avalé, le sport, l’art, le patrimoine, les religions elles-mêmes, toutes ces activités désintéressées ont été rattrapés, dévorées même par les lois du marché » (Le Figaro, 11 avril). L’auteur a l’air d’aimer ce qu’il nomme « le capitalisme artiste. » Si j’étais artiste, je porterais plainte.

Gérard Streiff

Gérard Streiff



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