CN / PCF / Novembre 2010 / Synthèse

Présidentielle

La situation est ouverte

Dans la première partie de son rapport, Pierre Laurent analyse la « nouvelle situation » créée après la « mobilisation exceptionnelle sur les retraites ». Avec un « mouvement social (qui) sort renforcé des mois qui viennent de s’écouler » et une droite qui « n’a pas réussi à juguler une opposition majoritaire, combative et persistante de notre peuple à la mise en œuvre des solutions capitalistes préconisées dans tous les pays de l’UE. » D’où la question : « Cette situation peut-elle déboucher sur une défaite politique plus globale et plus durable de cette droite ? Et peut-elle ouvrir la voie à une alternative politique de gauche porteuse de choix politiques en rupture avec les choix actuels ? C’est l’enjeu de la période à venir. » Ici, le rapporteur fait tout de suite cette remarque, sans doute le cœur de son exposé : « Rien n’est automatique, nous le savons très bien. Mais rien n’est joué non plus. La situation est ouverte. Il nous faut donc apprécier lucidement les potentiels et les obstacles de la période. » Ce qui se traduit par exemple par une envie de gauche et aussi un scepticisme sur la gauche. Et puis, pour passer de la colère à l’espoir, l’adhésion à une ou des mesures nouvelles ne suffit pas, il faut que le chemin vers le changement soit crédible.

Comment faire ? Le secrétaire national soulève quatre questions. UN : l’ambition. « Au lendemain d’un mouvement social aussi profond, notre objectif ne peut être de limiter les dégâts. Nous voulons contribuer de toutes nos forces à faire grandir dans le peuple et par le peuple un projet collectif conforme aux attentes de changement du mouvement populaire. » Ici, le Front de gauche doit être « le moteur de cette ambition, l’énergie positive à gauche. Nous l’avons initié pour cela. » DEUX : l’élaboration du programme partagé. Pierre Laurent se félicite que les choses démarrent, cite la rencontre nationale (des 26-28 novembre), la série de forums publics nationaux du Front de gauche : « L’enjeu doit être de dégager les thèmes rassembleurs, fédérateurs, capables d’unir une majorité de nos concitoyens, et du même coup de crédibiliser la possibilité d’un changement dès lors considéré comme accessible. » TROIS : les formes populaires et citoyennes d’association à notre démarche. Pour le rapporteur, le Front de gauche, ce doit être une autre manière de faire et de vivre la politique. « Les campagnes du Parti communiste, du Front de gauche, on ne doit pas les suivre, on doit les vivre. » QUATRE : la candidature à l’élection présidentielle pour 2012. De fait, le débat a démarré. Jean-Luc Mélenchon s’est déclaré disponible, André Chassaigne également. Le secrétaire national propose : « Je crois qu’il ne s’agira pas seulement de choisir un nom, une personnalité, mais un cadre politique et un dispositif collectif de campagne. » D’où l’idée d’engager la discussion à partir d’un texte adopté par le Conseil national qui dirait les principes à partir desquels les communistes envisagent une candidature du Front de gauche : « Ce texte devrait probablement proposer une définition de l’ambition politique visée en 2012, énoncer les grands thèmes structurants du travail sur le programme partagé, proposer des modes et des formes de déploiement populaire de notre démarche, ainsi qu’un dispositif et un style collectif de campagne associée à la candidature. » Le document devrait également évoquer la manière dont le PCF rassemble les deux échéances de 2012, présidentielle et législatives. Un Conseil national se tiendrait le 7 janvier pour adopter ce texte et convoquer le congrès. Un premier échange pourrait avoir lieu lors de la
rencontre des animateurs de section le 8 janvier, et fournir un premier cadre de réflexion, avant le choix d’un nom. Pour en rester au calendrier : le rapporter juge raisonnable de considérer que la base commune de discussion que le CN adoptera avec sa proposition définitive d’orientation et de candidature soumise aux communistes n’interviendra qu’au lendemain des cantonales, juste après, début avril. Il évoque encore l’importance des prochaines élections cantonales et sénatoriales.

UN ESPACE POLITIQUE

Un débat s’engage, fourni, durant près de quatre heures. Il y est question de crise, des grands enjeux à travailler ( la santé par exemple ), des contradictions qui marquent le paysage politique. Plusieurs intervenants reviennent ainsi sur l’idée qu’il n’y a pas d’automatisme entre crise et alternative, luttes revendicatives et changement politique, misère sociale et aspiration au nouveau ; on pointe la défiance persistante à l’égard de la politique, l’abstention (notable dans les partielles), le vote d’extrême droite aussi (à deux ans de la présidentielle, la fille Le Pen réalise un score dans les sondages bien supérieurs à ceux de son père). D‘autres montrent qu’un espace politique nouveau existe à gauche : certes le patron du FMI, DSK, continue de faire un carton dans les enquêtes de popularité mais l’attentisme du PS est montré du doigt ; le mouvement social a aussi fait bouger les idées sur la finance, l’utilisation de l’argent ; on entend à gauche des critiques plus vives à l’égard des marchés financiers ; ça bouge dans les têtes. Il y a une disponibilité nouvelle pour débattre, échanger, construire. Un espace politique nouveau existe donc mais pour l’occuper, il va falloir –disent des intervenants - faire un gros effort politique pour réinteresser à la chose publique, reprendre contact, relancer l’espoir, se montrer crédible, obtenir une réelle appropriation citoyenne : « Si on fait pas ça, on pèsera pas sur le débat d’idées ! »
Différents orateurs disent qu’il va falloir « changer de braquet » , ce qui n’est pas le plus facile à faire. Dans le débat, il est beaucoup question de la présidentielle, naturellement. Tous se félicitent d’aborder enfin le sujet. Quelques uns échangent des reproches, genre « antimelanchonisme » d’un côté, « liquidation » de l’autre ; mais plus généralement on redit que ce qui doit primer dans cette élection, ce sera le contenu de la campagne, sur des thèmes rassembleurs et ambitieux et dans une démarche citoyenne ; le choix de l’individu viendra en son temps, en sachant qu’en dernière instance, ce seront les communistes, souverains, qui décideront.
Au terme de la réunion, comme une forme de transition avec la Rencontre nationale sur le projet qui allait suivre, le CN a écouté trois témoignages de pratiques militantes originales . Marcel Dovati a parlé du « mois de la protection sociale », une initiative de débats et de travail de la fédération des Bouches du Rhône où plusieurs milliers de participants au total ont dialogué, diagnostiqué la crise de la santé et commencé à élaboré des pistes neuves. Eric Rouleau, maire de Limay dans les Yvelines, un élu qui vient du mouvement syndical, a montré l’ampleur de la détresse sociale, la pauperisation à l’œuvre parmi ses administrés ; il a insisté sur ce conseil de bon sens : « Il faut aller là où les gens sont » . Enfin Francis Wurtz a « restitué » l’esprit de la dernière rencontre du CN, en octobre, qui auditionna plusieurs acteurs clés du mouvement social, insistant sur l’envie partagée de « retrouver le chemin du progrès », le doute sur l’efficacité du politique, le souhait de travailler ensemble, aussi pour dépasser les interrogations qui demeurent.

Gérard Streiff



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