Clemençon

Frédérique Clémençon

Traques

L’olivier

Quatre voix pour dire la vie sous contrôle, sous toutes ses formes, quatre naufrages mais aussi quatre tentatives de sauvetage. Elisabeth est octogénaire, ex épouse d’un notaire, mère de deux garçons, l’un qui lui est tout dévoué et qu’elle n’aime pas, l’autre, voyou, parti, qu’elle regrette. Elisabeth est dans un hôpital et en partance pour une maison de retraite, perspective qu’elle refuse ; sa rage intérieure repousse le moment de sa mort. Vincent, fils d’Elisabeth, intello (historien), sage cadre d’entreprise qui perd son temps dans cette grande société ; une totale indifférence à la vie du groupe, à ses normes, sa fausse convivialité ; allergique à la vie de bureau où toutes les relations finissent en statistiques. Anatole est émigré venu de l’Est, où les siens ont été décimés, et qui vivote dans une déchetterie électronique ; il s’attache à Jeanne, jeune femme en errance, qui finit par fuir sa famille mortifère.

Quatre personnages désemparés mais qui pourtant gardent les yeux ouverts, ne restent pas inertes, bougent, ébauchent une sorte de résistance ; quatre personnages qui ont en commun de refuser d’être assignés à résidence ; on leur ordonne d’être ici et eux vont plutôt là bas ; quatre personnages qui disent non à l’enfermement qu’il soit politique, professionnel, clinique ou familial. Derrière eux, on voit aussi ( surtout) la violence du monde, la brutalité du contrôle qu’exerce la société.

Une belle écriture, une belle poésie brute pourrait on dire pour évoquer la solitude et la traque.

De Frédérique Clémençon, une critique a dit : « ses personnages ont un air de courant d’air ; corps friables, enfants prisonniers de blocs de névroses familiales, ambitions faibles ; il n’y a rien à voir ; il n’y aurait rien à voir ; mais la romancière fait entendre, sous un lissage des apparences, le crépitement du feu ; ses histoires sont traversées d’un mince courant électrique avec risque d’embrasement général ; elle nous tient. »



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