25 mars 2010

Conversion ratée

Une expression africaine dit qu’il ne faut pas demander aux moustiques d’inventer un insecticide. Légèrement adapté, on pourrait écrire ainsi l’adage : il ne faut pas demander à un libéral de mettre en cause le capitalisme.
Dernier exemple en date : le plaidoyer que signe dans « Le Monde » un économiste de l’université Paris-Dauphine, sous le titre « Revenir au véritable capitalisme ». Sa thèse est carrée : nous ne vivons pas sous un régime capitaliste mais sous un étatisme permanent, source de crise. « C’est l’interventionisme des Etats et l’affaiblissement des disciplines du capitalisme à notre époque qui ont empêché les marchés de jouer leur rôle régulateur. » Conclusion : « Il n’y a pas à réformer, à contrôler ou à moraliser le capitalisme, il faut le restaurer. » On pourrait se moquer d’un tel tour de bonneteau si on ne connaissait l’auteur de cet argumentaire : Pascal Salin, LE gourou du libéralisme à la française et tête de file des économistes réacs. En fait, nos libéraux se démènent dans un beau paradoxe. D’un côté, leurs dogmes sont omniprésents dans la société, brandis par les entreprises, en honneur dans les médias, portés par le pouvoir, mis en place avec ardeur dans tous les ministères, de l’Education nationale aux affaires sociales ( privatisation, concurrence, désengagement…). Et dans le même temps, ces orientations ravagent et rebutent. Salin lâche cette petite phrase qui dit bien son dépit : « Après un XXè siècle heureusement terminé par l’effondrement des régimes communistes, on pouvait penser que le monde se convertirait au capitalisme, aussi bien dans les faits que dans les esprits. Il n’en a rien été. »

Gérard Streiff


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